Festival des 5 continents

Pas de doute : l’histoire du jazz à Marseille débute dès les années 1920 avec le formidable Banjo de l’écrivain Claude McKay, qui décrit la vie tumultueuse, jour laborieux et nuit fiévreuse, de la communauté noire sur les docks et dans les boîtes. Entre les lignes, la cité phocéenne y est dépeinte comme multiculturelle, arrimée au jazz. Un siècle plus tard, les mots du Jamaïcain résonnent à la lecture du programme du festival des 5 Continents, en une semaine qui témoigne de l’ouverture de cette esthétique aux autres musiques. Le jazz ici et maintenant s’y entend comme l’une des possibles caisses de résonance d’un monde connecté en toute intimité. Tel est le propos du duo Vincent Ségal et Ballaké Sissoko, un libre échange qui aurait pour sûr séduit Claude McKay. On pourrait en dire tout autant de la rencontre féconde de deux frères d’âmes, le Cubain Omar Sosa et le Sarde Paolo Fresu.  Ces échanges témoignent de la diversité à l’oeuvre dans le paysage du jazz actuel. Ce que confirment tout autant le contrebassiste Avishai Cohen, dans sa relation à la musique ladino de ses origines, et le trompettiste Ibrahim Maalouf, dont l’opus Diagnostic fait état de sa quête identitaire passée au filtre de la musique réflexive. Ces deux-là, Israélien et Libanais, se retrouvent sur la même scène, alors que les frontières de leurs pays sont closes. C’est cela aussi le jazz, la possibilité de briser les cadres, d’ouvrir les horizons. Une belle histoire que raconte depuis plus d’un demi-siècle Sonny Rollins, en clôture de festival, colossal saxophoniste dont les racines se trouvent dans les Caraïbes et dans les accents d’un bon vieux banjo…

Jacques Denis

Du 18 au 25 juillet dans les Jardins du palais Longchamp, à Marseille. Tel. : 04 96 11 04 61. Places : de 23 à 30 €.