Le Monde à l’envers de Kaori Ito

Dans le hall du KLAP, qui accueille la création du Monde à l’envers, Bastien Charmette fait défiler les images du théâtre Kamishibaï inventé par Kaori Ito. Il y est question d’un monde sens dessus dessous où la terre, trop piétinée, a filé vers le ciel. Seuls les secrets confiés par les enfants ont le pouvoir de le remettre à l’endroit. A l’issue de ce joli préambule, les têtes blondes – qui groupées autour du danseur ont religieusement écouté cette histoire – puis leurs parents sont invités à regagner la salle. Là, un téléphone retentit avant que son répondeur ne s’enclenche puis dévoile les précieux secrets, sucrés ou acidulés. « Ma copine s’est transformée en monstre rose de l’amour ». « Papa m’a fait un bobo et maman lui a dit qu’on tape pas les enfants ». Et bien sûr, « j’étais », « je suis », ou « je veux être », « un super héros ».

Une épopée tendre et loufoque

Quand la sonnerie retentit à nouveau, c’est fascinée mais paniquée que Morgane Bonis grimpe sur le plateau. Son corps, robotique et désarticulé, lui joue de vilains tours. Ses mains lui échappent pour mieux claquer ses joues tandis que son visage grimace. Adeline Fontaine, plus téméraire, finit par la rejoindre : « Le monde court un grand danger, vous seuls pouvez nous sauver, êtes-vous prêts » ? Ils le sont et Bastien Charmette quitte lui aussi le groupe d’enfants installés à l’avant-scène pour partir à l’aventure. Voilà donc nos trois héros, peu sûrs d’eux mais le cœur plein d’entrain, qui enfilent capes et lunettes de plongée comme le ferait Wonder Woman ou autre Superman. S’ensuit un voyage où le vocabulaire emprunte autant à Marvel qu’aux mangas. Pour arriver au bout de ce périple, il leur faudra beaucoup de courage et de danse, mais surtout la participation d’enfants ravis de pouvoir s’exprimer. Avec Le Monde à l’envers, Kaori Ito nous offre le pendant malicieux de son saisissant Chers, dans lequel elle donnait à entendre les messages des vivants à leur défunts. Servie par trois superbes interprètes, elle signe une épopée tendre et loufoque qui invite à croire en sa créativité, à assumer sa singularité.

Delphine Baffour