Les 20 ans de Faits d’Hiver

Faits d’Hiver fête ses vingt ans mais refuse de regarder dans le rétro. Une sage décision de son directeur et créateur, Christophe Martin, qui en a plutôt profité pour aller plus loin, au sens propre comme au sens figuré. Ainsi, le festival investira dix lieux (un de plus que l’an dernier !) et ira, pour la première fois, à la Gaîté Lyrique où sera présenté Témoignage d’un homme qui n’avait pas envie d’en castrer un autre…de Thibaud Croisy, une pièce visuelle et sonore sans interprète issue d’un documentaire, avec le sadomasochisme pour sujet. Audacieux, le festival a choisi plusieurs propositions pointues et originales, comme Sur l’interprétation – titre de l’instant de Yaïr Barelli, qui mêle l’artifice à l’ordinaire, ou Discontrol Party de Samuel Bianchini, un dispositif interactif qui fait se rencontrer deux mondes :  celui des technologies de surveillance et celui de la fête. Piste de danse ou salle de spectacle deviennent jusqu’au petit matin un night-club un peu spécial…

Des géographies variables

Tout aussi radicales, même si elles sont des habituées du festival, Camille Mutel et Aude Lachaise offrent chacune une création. Si la première expérimente l’endroit où le réel du corps transgresse les catégories du corps social dans Animaux de béance, la seconde revisite la virtuosité du stand up dans une physicalité décapante dans Outsiders, la rencontre. Blitz – 9000 Pièces est une carte blanche programmée par Joanne Leighton qui ouvrira la manifestation. À la fois performance et installation, intergénérationnelle et pluridisciplinaire, elle ausculte les traces de la danse dans notre monde actuel saturé d’images. La chorégraphe d’origine australienne présentera également Songlines, une création inspirée par la culture aborigène et la pratique ancestrale de la marche. En écho, Négotiation, création d’Olé Kamchanla et Pichet Klunchun, s’interroge sur ce qui fait tradition pour irriguer leur propre écriture chorégraphique. Quant à Lionel Hoche, il revisite avec humour son enfance dans un jeu de piste chanté et dansé intitulé samedicarrément. Après cette pièce « dé-concertante » on pourra se précipiter voir Allein ! signé Erika Zueneli, qui s’articule autour de l’idée de concert comme métaphore tangible du désir collectif. Dans cette même veine plutôt musicale, ne ratez pas les trois pièces courtes de Yuval Pick. Après Géographies (ou Classroom) d’Eleonore Didier et Lila Derridj, et mA de Satchie Noro et Yumi Rigout, Arthur Perole clôturera en beauté cette 20^e édition avec la création de Fool d’Hiver à la Conciergerie dans le cadre de Monuments en mouvement.

Agnès Izrine