Naissance d’un chef-d’œuvre

« J’avais depuis longtemps le projet de monter En attendant Godot. Cette pièce, je la connais depuis toujours, mais c’est en commençant à travailler dessus avec un des comédiens de ma compagnie Mack et les gars que j’ai découvert les circonstances de sa création. Un entretien de Roger Blin trouvé sur le site de l’INA m’a particulièrement touchée. En quelques minutes, face caméra, il y dit les difficultés qu’il a rencontrées pour pouvoir monter la pièce. Le refus des directeurs de théâtre surtout, qui sera suivi par celui de nombreux comédiens. J’ai trouvé là ce qui me fascine au théâtre : la force d’une intuition et l’opiniâtreté que peut mettre un artiste à la défendre. C’était décidé : j’allais raconter ce combat depuis l’achèvement du texte en 1949 jusqu’à sa première représentation le 4 janvier 1953 au Théâtre de Babylone. Un petit théâtre en faillite créé par Jean-Marie Serreau qui a eu cette très belle phrase : « s’il faut mourir, mourons en beauté ».

Beckett, une révolution

Naissance d’un chef-d’oeuvre est donc construit autour du personnage de Roger Blin, interprété par Laurent Collard. Hormis ce comédien et Barthelemy Goutet dans le rôle de Beckett, tous incarnent plusieurs personnages. Suzanne, l’épouse de Beckett qui a remis le manuscrit de Godot à Blin, les comédiens, les gens de la production, les journalistes… Tous les acteurs qui ont participé à la naissance du mythe. Au renouvellement des formes, car c’est bien cela qu’ont proposé Beckett et Blin dans le Paris d’après-guerre. Pour faire ressentir cette révolution, j’invite le public dans les coulisses de cette histoire dont les ratés débouchent sur une incroyable réussite. Images et vidéos composent un espace onirique et intemporel, tout comme En attendant Godot qui continue d’être joué partout dans le monde ».

Propos recueillis par Anaïs Heluin