Point d’interrogation et Tempête !

« Nous allons du plus grand classique au futurisme de Massini avec les mêmes acteurs. »

Pourquoi venir à Avignon avec ces deux spectacles ?

Irina Brook : En arrivant au CDN de Nice, j’ai découvert qu’il était très difficile de faire venir les programmateurs et les directeurs des autres théâtres du territoire, comme si Nice était toujours trop loin ! Il m’a donc semblé important de venir jouer à Avignon pour donner l’occasion de découvrir ces spectacles. Cela ne correspond pas à un besoin narcissique de reconnaissance personnelle, mais c’est parce que je crois que Point d’interrogation, par exemple, qui en est à ses tout débuts, mérite vraiment d’être vu. Les programmateurs qui l’ont vu l’ont réservé immédiatement, mais il a seulement été joué dans quatre ou cinq lieux, ce qui me paraît insuffisant pour un texte aussi pertinent et percutant.

En quoi est-il si important ?

I. B. : C’est un texte qui parle du futur et de là où on en est. C’est un théâtre important, qui fait beaucoup réfléchir, à commencer par les plus jeunes. Il serait dommage de l’enterrer à Nice ! Même si je l’imaginais à l’origine pour les adolescents, les enfants l’apprécient beaucoup et il marche très bien avec eux ! Stefano Massini a écrit un long monologue qui questionne le futur qui arrive à une vitesse exponentielle. Que va-t-on manger, comment sera le virtuel, l’école, la médecine, etc. ? Quatorze questions dessinent la trame de ce spectacle que j’ai voulu très drôle, même si le propos est très grave. On pourrait traiter ce texte de toutes sortes de façons, mais nous avons pris le parti d’en passer par le rire, dans une perspective ludique et ironique.

Vous présentez, en alternance, Une Tempête !

I. B. : Nous allons du plus grand classique au futurisme de Massini avec les mêmes acteurs, les Eclaireurs. J’avais beaucoup tourné ce texte avec ma compagnie, avant de diriger le Théâtre National de Nice, avec des acteurs plus matures. Shakespeare est à la tête de mon projet didactique et pédagogique. J’ai choisi quatre acteurs très jeunes, dans une version très légère, tout en conservant la profondeur des thèmes : la compassion, le pardon, la vengeance et la liberté. Cette Tempête en une heure est faite pour un public qui n’irait jamais voir Shakespeare sinon. Je trouve ça très réjouissant d’aller directement à Shakespeare et de ne pas négocier sur la qualité de façon démagogique, surtout avec les jeunes, qui d’ailleurs adorent ce spectacle ! Je crois cet auteur absolument essentiel et indispensable à notre époque : le jouer relève d’une volonté d’évangélisation de la croyance au pouvoir du théâtre ! Dit comme tel, cela paraît pompeux : gardons l’humour pour le dire, mais redisons l’importance de notre mission d’excellence du service public !

Propos recueillis par Catherine Robert